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GABRIEL-FRANÇOIS DOYEN
                        (PARIS, 1726 – SAINT-PÉTERSBOURG, 1806)


                        Une Jeune Personne occupée à lire une brochure,
                        ayant son chien sur les genoux

                        1761
                        Huile sur toile 73 x 58,2 cm
                        Signée et datée en bas à gauche « Doyen 1761 » Au revers, sceau de la Cour impériale de Russie
                        Expertisé par Pierre Rosenberg.
                        Certificat René Millet Expertise
                        Provenance
                        Ange-Laurent de La Live de Jully, Paris, 1770 ; Madame Ingres, Paris, 1894 ;Karl Lagerfeld,
                        Christie’s, New-York, 2000.


                             Si cette jeune femme, totalement absorbée par sa lecture, ne nous prête guère
                        attention, son jeune chien, confortablement installé sur ses genoux, nous jette en revanche
                        un regard légèrement craintif. Elément de parure de sa maitresse, tel un manchon, ce chiot
                        est l’archétype de l’animal de salon. Sa maitresse, apprêtée, est richement vêtue d’une robe
                        de soie dont l’écarlate trouve ses échos dans la coiffe et plus encore dans le pourpre des joues,
                        maquillées selon le goût de l’époque. Des perles ceignent son cou et ornent ses cheveux.
                        La coiffure comme le col de dentelles relevé renvoient aux costumes de théâtre, dits « à
                        l’espagnole », tels que l’on peut en trouver notamment dans les « figures de fantaisie » de
        86              Fragonard, contemporaines,  et plus particulièrement dans  la  jeune femme de L’Etude,
                        conservée au musée du Louvre. Cette lectrice, peinte à mi-corps, s’inscrit parfaitement dans
                        la composition en ovale. Les couleurs sont savamment réparties, avec ce rouge ponctuant la
                        palette avec équilibre. La lumière vive d’un éclairage artificiel, vient baigner la carnation du
                        modèle, son visage, son décolleté et sa main, alors que le fond, rejeté dans l’ombre, évoque
                        une scène nocturne. Il ne s’agit pas ici d’un portrait mais plutôt d’une figure de fantaisie dont
                        étaient friandes les élites de l’Ancien Régime pour décorer leurs intérieurs raffinés.

                             Gabriel-François Doyen (1726-1806) est un peintre français qui connut une carrière
                        officielle d’envergure. Issu d’une lignée de tapissiers royaux, Doyen est formé dans l’atelier
                        de Carle van Loo. Prix de Rome en 1748, il sillonne l’Italie de Turin à Palerme étudiant
                        les œuvres du Dominiquin, de Cortone, ou encore de Giordano. En 1761, il est reçu à
                        l’Académie royale de peinture et de sculpture où il exercera comme professeur à partir de
                        1776. Gabriel – François Doyen, se rend alors célèbre pour les grandes commandes qu’il
                        reçoit du clergé comme la chapelle Saint-Grégoire à l’église des Invalides à Paris (1765-1772)
                        et, pour ce qui constitue son chef-d’œuvre, le retable de Sainte Geneviève, Le Miracle des
                        Ardents (1767) pour l’église Saint-Roch à Paris, dont un format réduit est exposé au Louvre.
                        En 1774, la ville de Reims lui commande la décoration urbaine des fêtes du sacre de Louis
                        XVI. Il exécute aussi une suite de peintures d’après  L’Iliade pour servir de modèles aux
                        tapisseries des Gobelins. Dans un registre plus profane, dont témoigne cette Jeune lectrice,
                        Doyen devient premier peintre du comte d’Artois en 1773, puis, de Monsieur, frère du roi.
                        Ces titres lui vaudront de fuir la France pour la Russie en 1792, pour devenir alors le peintre
                        du tsar Paul Ier. C’est ainsi que ce tableau appartint un temps aux collections impériales.
                        Nommé directeur de l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg, Doyen forme alors
                        de nombreux peintres russes et reçoit plusieurs commandes de décors de palais impériaux.
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