Page 40 - catalogue tableaux_08-2020
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MARC CHAGALL
(LIOZNA, 1887 – SAINT-PAUL-DE-VENCE, 1985)
Pivoines et couple
1970
Huile, gouache, pastel et encre de Chine sur papier contrecollé sur carton 63 x 46,2 cm.
Certificat Comité Chagall.
Ne serait le titre, c’est avec peine que l’on discernerait ce couple si petit, en bas à
gauche, tant la présence des fleurs est invasive. Ces pivoines dont on devine à leur agencement
qu’elles prennent place dans un vase dont on aperçoit la base, sont vues du dessus et occupent
la quasi-totalité du tableau. Le couple, représenté à mi-corps, ne semble pas appartenir au
même espace. Blottis l’un contre l’autre, l’homme et la femme flottent et se fondent dans
un espace blanchâtre, floconneux, qui sert de fond à la composition. Mais paradoxalement,
motif parmi les fleurs, ce couple appartient aussi au bouquet et en semble une émanation.
La technique même de l’artiste est ambivalente. L’alternance de touches colorées libres, où
dominent les roses et les verts, et d’un graphisme au trait noir, venant cerner les formes de
façon non systématique, font osciller l’œuvre entre peinture et dessin. Le support, du papier,
affleure par moments, en réserve.
Ce bouquet est caractéristique du style enlevé et par là-même onirique de Marc
Chagall (1887-1985), peintre prolifique qui touche à toutes les techniques. Originaire de
Biélorussie, il vient s’installer à Paris en 1910 après des études à l’Ecole des Beaux-Arts
40 de Saint-Pétersbourg. S’il s’intéresse aux artistes d’avant-garde, il n’appartient à aucun
mouvement, gardant une liberté de style très personnel. Artiste cosmopolite, il expose à la
fois à Paris, au Salon des Indépendants de 1914, et à Berlin aux côtés de Paul Klee. Exposé
chez Vollard, il connait la notoriété aux Etats-Unis où il se réfugie pendant la guerre. Sa
peinture est empreinte de ses origines juives et évoque en filigrane la vie des shtetl d’Europe
de l’Est. Elle fait référence à des souvenirs d’enfance. Ses personnages souvent en lévitation,
comme dans ce Pivoines et couple, traversent les œuvres comme autant de motifs poétiques
voire mélancoliques dégagés de toute intention narrative. A la tragédie des sujets toujours
latente répond pourtant l’emploi d’une touche colorée, vive, apportant gaité et optimisme.
Cette œuvre appartient à la fin de sa vie quand, retiré à Saint-Paul-de-Vence, il s’intéresse à
la lumière de la côte d’Azur.