Page 200 - catalogue tableaux_08-2020
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HENRI ROUSSEAU,
DIT LE DOUANIER ROUSSEAU
(LAVAL, 1844 – PARIS, 1910)
Nature morte au panier de cerises
1880
Huile sur toile signée et datée en bas à droite
25 x 35 cm.
Légèrement décalée sur la gauche, une corbeille remplie à ras bord de fruits occupe le
centre de la composition. Curieusement, cette corbeille est placée à l’arrière-plan de la table
sur laquelle elle est posée laissant un large premier plan sur lequel se dispersent quelques
fruits échappés du panier. Le fond du tableau est d’un noir opaque nous renvoyant sur
les fruits ainsi mis en valeur. Ce sont des cerises et des groseilles, rouges et blanches, ainsi
que des cassis plus noirs et des feuilles vert vif qui emplissent cette corbeille. Leur réunion
semble plutôt résulter d’un choix plastique comme l’atteste leur répartition régulière. Le
peintre cherche ici à alterner avec harmonie des sphères colorées, sans souci de réalisme.
Ainsi chaque baie est représentée dans son intégralité sans recherche d’effet de perspective
qui en masquerait une partie. Le monticule de fruits semble dès lors un peu artificiel. De
même, ces quelques baies disséminées avec régularité sur la table semblent prendre des poses
un peu trop dynamiques, telles ces cerises « debout » la queue dressée. Le traitement naïf de
cette peinture n’en accentue que davantage les qualités chromatiques. Ici la couleur domine.
Jaillissant du noir de l’arrière-plan, notamment les groseilles blanches, ou du vert tendre de
200 la table, les cerises rouges, les couleurs se répondent, complémentaires. La touche est lisse,
régulière, appliquée prodiguant une certaine sérénité et un plaisir des yeux.
Henri Rousseau, dit le Douanier Rousseau (1844-1910) est un peintre français,
autodidacte et chef de file de la peinture naïve. Son surnom lui vient de son premier métier
à l’octroi de Paris. Venu tard à la peinture, il apprend d’après les maitres anciens en devenant
copiste au musée du Louvre. A partir de 1886, il expose au Salon des indépendants, imposant
peu à peu son style qualifié de naïf mais à la technique très élaborée. Critiqué des milieux
académiques il est en revanche apprécié des avant-gardistes qui louent en lui sa candeur et
sa fantaisie mais aussi et ses talents de coloriste. Il se lie avec Delaunay, Signac, Apollinaire
et même Picasso qui conservera l’un de ses portraits toute sa vie. Son goût pour l’exotisme,
le conduit à représenter des jungles fantastiques dont il n’a connaissance que par des livres
illustrés. Il y fait preuve d’une grande inventivité privilégiant la précision des détails au
réalisme de la scène. Il développe le premier ce style naïf qui aura une si grande postérité
notamment chez les Surréalistes.