Page 204 - catalogue tableaux_08-2020
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PAUL SIGNAC
(PARIS,1863 – PARIS, 1935)
Saint-Briac, de ma fenêtre
1865
Huile sur toile signée en bas à gauche 65 x 45 cm.
Cette œuvre est répertoriée dans le Catalogue raisonné de l’œuvre peint de Paul Signac,
Françoise Cachin, Paris, 2000.
Depuis une vue plongeante, on surplombe une cour fermée jouxtant un jardin, à
gauche. Au loin, au-delà de champs et de haies, on devine la découpe arrondie d’une côte ; on
imagine la mer en contrebas. Au tout premier plan, un parapet bordé de part et d’autres de
plantes, nous explicite ce point de vue. Signac peint depuis ce promontoire qu’il ne cherche
pas à nous dissimuler. Son orientation oblique le rend encore plus présent et appuie ce
cadrage photographique. Le titre déjà nous révélait son intention : montrer un point de vue à
un moment donné, comme pour le fixer à jamais. Pour autant, la démarche reste atemporelle
car pas un personnage ni même un détail significatif ne viennent trahir une époque. Le
traitement du paysage est une juxtaposition de petites touches colorées dans une gamme
pastel, douce et lumineuse, où dominent les roses, les mauves et les bleus pâles. Au fur et à
mesure que le regard s’enfonce dans le paysage, les couleurs s’atténuent au point de presque
se fondre avec le ciel pommelé. Les verts des feuillages du premier plan sont en revanche plus
nets car plus proches. Ce rendu d’une perspective atmosphérique par la fragmentation des
couleurs témoignent d’une observation poussée de la nature et des recherches formelles de
204 Signac qui l’ont amené au pointillisme.
Paul Signac (1863-1935) est un peintre français à l’origine du pointillisme avec
Georges Seurat. A l’âge de 17 ans, il décide de devenir peintre et loue un atelier à Montmartre.
Refusant l’apprentissage de la peinture au travers d’écoles, il fréquente l’atelier d’Emile Blin et
se perfectionne seul, influencé par les impressionnistes. Il se lie d’amitié avec Seurat en 1883
et fonde avec lui et Pissarro, le groupe des « impressionnistes dits scientifiques » cherchant à
rationaliser leur approche chromatique de la peinture. Ils élaborent une technique qualifiée
de « divisionniste » consistant à fragmenter les couleurs en points, qui les conduira au
pointillisme. La mort de Seurat en 1891, laisse Signac désemparé. Il voyage alors à travers la
France, peint les côtes normandes et bretonnes comme ici ce Saint-Briac, de ma fenêtre qui
date de cette période nomade. Puis il se fixe à Saint-Tropez qui devient un lieu de passage
d’artistes très divers de Matisse à Maurice Denis. Coloriste passionné, il dote ses paysages
d’une palette de plus en libre qui définira son style et dont on perçoit déjà l’empreinte dans
cette toile bretonne.