Page 20 - catalogue tableaux_08-2020
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EUGÈNE BOUDIN
(HONFLEUR, 1824 – DEAUVILLE, 1898)
Les Bords de la Touques à Trouville pendant les grandes marées
1889
Huile sur toile, signée et datée en bas à droite « E. Boudin 89 » 50,2 x 74 cm.
Publication
Œuvre reproduite dans Eugène Boudin, 1824-1898, Robert & Manuel Schmit, Deuxième
supplément, vol. II, Paris, 1993, n° 4000 (illustré p.61).
Provenance
J. Eastman Chase (1840-1923), marchand d’art, Boston ;
William Whitman, Boston (puis par descendance au sein de la famille
jusqu’à l’actuel propriétaire).
C’est l’aspect ouaté qui domine ici. Le ciel, aux nuages pommelés, charrie ces derniers
dans un désordre grumeleux. Reliés les uns aux autres de façon aléatoire, ils forment une
masse disparate et clairsemée où chacun conserve cependant sa propre densité. En contrebas,
les berges de la Touques, offrent un même aspect pommelé, où la masse des rives se délitent
dans la crue des eaux. Proche de son embouchure, la rivière est, en effet, envahie par la
montée exceptionnelle de la marée, qui déborde sur ses berges de façon désordonnée. Si le
peintre choisit de nous montrer la rivière de biais, pour en accentuer la perspective, il en
brouille le tracé linéaire par les débordements erratiques de son lit. Ainsi, au tumulte des
cieux répond celui du sol, animés tous deux par la même violence des éléments, due aux
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grandes marées. Séparant ces deux masses, les silhouettes rondes des arbres délimitent un
horizon où quelque maison se profile. Perdu dans cette immensité, l’homme est relégué à
une petite touche bleue évoluant sur un chemin, à droite. L’homogénéité du paysage est
redevable à cette touche tamponnée qui construit chaque élément – nuages, arbres et berges
– et contraste avec le fond uni du ciel ou la surface lisse de la rivière. Quand la brosse de
Boudin privilégie un aspect tacheté, c’est pour nous suggérer une variation climatique, un
état instable du paysage…