Page 122 - catalogue tableaux_08-2020
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JEAN-JACQUES HENNER
(BERNWILLER, 1829 – PARIS, 1905)
Salomé
1903
Huile sur toile signée en bas à droite
100 x 66 cm.
Cette jeune femme cadrée à mi-corps, nous jette un regard de défi, la tête légèrement
penchée vers nous. Hiératique, occupant le centre de la toile, elle en détermine le format tout
en hauteur. Sa carnation claire, légèrement dorée, irradie. Buste et bras, dénudés, semblent
échappés d’une tunique rouge écarlate, aux accents sanguins. Sa longue chevelure brune se
confond avec un arrière-plan crépusculaire mais dans lequel on devine un paysage grâce au
carré bleu-gris évoquant le ciel. De son bras replié, elle tient plaqué contre elle un plateau
doré dont seule l’arête luit, formant un arc géométrique qui apporte à la femme son éclat et
son identité. Sensuelle sans être langoureuse, déterminée sans être arrogante, on reconnait
Salomé, venant avec entêtement réclamer son dû, la tête de St Jean-Baptiste. Caractéristique
des types féminins voluptueux de Jean-Jacques Henner, ce modèle est peut-être Juana Romani,
femme peintre qui posa souvent pour lui. Familier des héroïnes bibliques, Henner a décliné
plusieurs Judith, dont l’une est le fleuron de son musée parisien. Cependant, délaissant
l’action dramatique, il préfère se focaliser sur la dimension psychologique de ses femmes
rebelles dont il dresse plutôt des portraits. Leur dimension tragique se loge dès lors dans leur
regard, froid et déterminé, leur port altier et leur beauté vénéneuse comme chez cette Salomé
122 au regard ombragé et aux lèvres fardées d’un rouge profond. Le voile rouge qui la pare, tout
comme sa longue chevelure, sont les attributs qui nous laissent deviner le potentiel érotique
de la danse langoureuse grâce à laquelle elle obtiendra son macabre caprice.