Page 114 - catalogue tableaux_08-2020
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CHARLES-FRANÇOIS GRENIER DE LACROIX,
                        DIT LACROIX DE MARSEILLE
                        (MARSEILLE, 1700 – BERLIN, 1782)


                        Vue méditerranéenne au lever du soleil avec des pêcheurs
                        et des femmes

                        Vue d’un port méditerranéen au coucher du soleil avec une arche
                        romaine et des marchands sur le quai avec un bateau hollandais

                        1767

                        Huiles sur toile (une paire)
                        Signées et datées en bas à droite « De Lacroix 1767 »
                        Chaque : 56,8 x 82,5 cm.

                        Certificats René Millet Expertise.


                             Tout oppose mais aussi réunit ces deux tableaux en pendant. L’un évoque la campagne,
                        avec ses rivages naturels, l’autre la ville, avec ses quais urbanisés, le pittoresque du rustique
                        et le grandiose de l’antique, enfin la pêche côtière et le commerce au long cours. Leur
                        juxtaposition permet de former une baie encadrée de part et d’autres par leur rive, sauvage
                        ou urbanisée, et laissant au centre l’horizon marin où se profile un bateau. A ces paysages
                        en miroir, s’ajoute une dimension temporelle car l’aube semble se lever, à gauche, sur les

        114             rives où s’activent déjà quelques pêcheurs, quand le soleil va se coucher, à droite, sur le
                        port ou s’attardent encore quelques marchands. Un détail cependant permet de relier ces
                        deux paysages et de les envisager dans une continuité. A l’horizon, dans la brume qui en
                        accentue le lointain, une tour, probablement un phare, se profile au pied d’une montagne et
                        marque l’entrée du port. Ainsi, il devient plaisant d’imaginer qu’il s’agisse de la même tour,
                        observée de deux points différents d’une même côte… Cependant, la configuration générale
                        et l’observation de la porte monumentale antique nous démontrent que le peintre n’a pas
                        cherché à représenter un lieu réel mais bien plutôt à inventer une vue imaginaire dans l’esprit
                        des compositions de Claude Lorrain ou, plus proche de l’artiste, d’Hubert Robert.

                             Lacroix de Marseille (1700-82) est un peintre paysagiste français qui s’établit à Rome,
                        de 1750 à 1763, où il découvre à la fois l’Antique et la peinture de paysages héritée du siècle
                        précédent. En effet, le Lorrain mais aussi Poussin y ont initié ce genre où abondent des
                        architectures antiques, citées ou revisitées. Mais ici pas de ports majestueux aux perspectives
                        rigoureuses mais une prédilection pour  le pittoresque et  pour une nature plus  sauvage.
                        Lacroix  développe  un  style sous  l’influence  de  Claude-Joseph  Vernet qu’il  rencontre  en
                        1751, lors de son séjour romain, et auprès duquel il apprend à peindre des marines. Vernet
                        qui vient de recevoir la commande du roi de sa célèbre série des Ports de France recherche
                        cependant l’exactitude quand Lacroix préfère une approche plus poétique. Ces pendants
                        de belle taille en sont un exemple éloquent. La maitrise du rendu des lumières aux deux
                        termes de la journée, irradiant la baie de leurs nuances spécifiques, restitue avec brio cette
                        atmosphère typiquement méditerranéenne. La fraicheur des couleurs, à la gamme élégante
                        et vive, confère à l’ensemble une vision enchantée du monde où les personnages évoluent
                        avec naturel. Sa peinture, fort prisée des amateurs du XVIII  siècle et qu’il décline à l’envi en
                                                                           e
                        en variant les effets – de nuit, du matin, d’orage,... – se retrouve aujourd’hui dans les plus
                        grandes collections privées et publiques.
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