Page 110 - catalogue tableaux_08-2020
P. 110
THÉODORE GÉRICAULT
(ROUEN, 1791 – PARIS, 1824)
Portrait présumé de Madame Elisabeth de Dreux
1817-1818
Huile sur toile 39,9 x 31 cm.
Certificat René Millet Expertise.
Voici le portrait en buste d’une jeune femme posant devant un paysage au ciel
tourmenté. Ne serait sa robe à taille haute et à collerette et sa coiffure sophistiquée avec
chignon et rouleaux qui trahissent son appartenance à la société bourgeoise de la Restauration,
on pourrait penser à un portrait de la Renaissance italienne. En effet, le cadrage à mi-corps
avec pour fond un paysage lointain et atemporel nous évoque les portraits de Botticelli,
Bellini ou même la Joconde de Vinci. La fenêtre ouverte sur le monde devant laquelle
pose le modèle permet au peintre d’imaginer un paysage qui la met en valeur et traduit
aussi ses états d’âme. Parfaitement mise en lumière, vêtue d’un blanc qu’atténue à peine un
châle bigarré, la jeune femme, légèrement décentrée, nous fixe d’un regard timide. Derrière
elle, un paysage montagneux aux reliefs bleutés pour en signaler l’éloignement, lui arrive à
hauteur d’épaules, laissant la majeure partie de la composition au ciel. Celui-ci, bleu intense
à l’horizon, est traversé de nuages sombres, dans un esprit très romantique, sans quelconque
intention d’effets météorologiques. Le modèle est l’épouse d’un ami du peintre, Pierre-Alfred
de Dreux, architecte et Prix de Rome. Géricault fera aussi le portrait de leurs enfants.
110 Théodore Géricault (1791-1824) est le premier peintre romantique français. Formé
dans l’atelier de Carle Vernet, il étudie auprès de Guérin. Bien qu’ayant échoué au concours du
Prix de Rome, il part à ses frais pour l’Italie en 1816, découvrir les peintres de la Renaissance.
C’est durant ce voyage italien qu’il peint ce Portrait présumé de Madame Elisabeth de Dreux,
probablement rencontrée à Rome, à la Villa Médicis où elle séjourne avec son mari, et qui est
un hommage aux beautés de la Renaissance. Mais Géricault est surtout marqué par l’œuvre
de Michel-Ange dont l’influence est manifeste dans les anatomies puissantes de son chef-
d’œuvre, Le Radeau de la Méduse. Exposé au salon de 1819, le récit de ce fait divers, élevé
au rang de la peinture d’histoire par son format monumental, fit scandale. Il décide alors de
partir pour l’Angleterre où il découvre les paysages de Turner et de Constable qui l’invitent
à enrichir les registres de sa peinture. Géricault est aussi le peintre des chevaux auxquels il
consacre de nombreux tableaux jusqu’à en réaliser des « portraits » à l’allure presque humaine.