Page 106 - catalogue tableaux_08-2020
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JEAN-HONORÉ FRAGONARD
(GRASSE, 1732 – PARIS, 1806)
La Coquette fixée
Vers 1755
Huile sur toile 98 x 85 cm.
Certificat René Millet Expertise
Publication
Œuvre est reproduite dans le Catalogue raisonné, Tout l’œuvre peint de Fragonard,
Pierre Rosenberg, Paris, 1989.
Trois jeunes gens batifolent dans un parc au pied d’un vase sculpté. La jeune fille,
assise au centre, est ballottée entre ses deux prétendants. À droite, l’enserrant par la taille,
le premier soupirant l’attire à lui pour lui susurrer quelque mot doux à l’oreille, cependant
qu’elle se retourne vers le second, à gauche, afin de le gratifier d’une couronne de fleurs.
Ce dernier, l’air langoureux, tient dans ses bras une cible dont le cœur est percé de deux
flèches. A leurs pieds gît un carquois rempli de flèches. Cette scène galante, au-delà des gestes
explicites, est connotée de symboles érotiques comme les flèches décochées par l’Amour dans
le cœur de la jeune femme ou le vase central, axe de symétrie phallique, dominant la scène.
Jusqu’aux couleurs suaves des vêtements masculins – rose orangé, corail – qui sertissent la
pureté du blanc de la robe.
Jean-Honoré Fragonard (1732-1806) est un peintre majeur du XVIIIe siècle français.
106 Formé dans l’atelier de François Boucher (1703-1770), Fragonard s’initie au style rococo du
maitre. Prix de Rome à 20 ans, il part en Italie en compagnie d’Hubert Robert et y découvre
la peinture virtuose de Tiepolo. En 1765, il est reçu à l’Académie comme peintre d’histoire
mais quitte ce grand genre pour se consacrer à une peinture plus galante voire érotique,
plus en phase avec les goûts de la cour de Louis XV. La légèreté de sa touche, qui sait saisir
l’instant fugace d’un regard ou d’un baiser, est toujours empreinte d’élégance et de retenue
comme en témoigne la Coquette fixée. A la frivolité du sujet, s’ajoute une candeur, soulignée
par des couleurs pastel. Les personnages, jamais grivois, incarnent plutôt l’innocence d’une
enfance toujours latente. La Petite jardinière appartient encore à cet âge tendre, spectatrice
avant d’être bientôt actrice. Les paysages bucoliques aux verts tendres, parsemés de fleurettes,
servent souvent d’écrin à ces idylles éphémères. Cette peinture de l’intime, destinée aux
appartements privés, est très en vogue au milieu du XVIII siècle, fort appréciée du roi et
e
d’une aristocratie libertine. Ces petits formats aux tonalités suaves siéent à merveille aux
alcôves pour lesquelles elles sont destinées.