Page 100 - catalogue tableaux_08-2020
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HENRI FANTIN– LATOUR
(GRENOBLE, 1836 – BURÉ, 1904)
Bouquet de dahlias
1874
Huile sur toile signée et datée en bas à gauche « Fantin 74 » 49 x 40 cm.
Publication
Oeuvre répertoriée dans le Catalogue de l’œuvre complet de Fantin-Latour,
Mme Fantin-Latour, 1911, n° 688, p.76.
Ce délicat bouquet de dahlias pompons, issus du jardin de l’artiste, pourrait rivaliser
par le soin porté à sa facture avec les plus beaux bouquets du siècle d’or hollandais.
Habilement mis en valeur sur un fond neutre d’un gris chaud, il occupe le centre de la
toile, s’épanouissant dans un vase au long fût semblable à une colonne. D’un verre bleuté,
ce dernier laisse transparaitre les tiges, longues et rectilignes, fins pilotis qui soutiennent
la masse végétale. La composition du bouquet, à la fois rayonnante et ramassée sur elle –
même, oriente les fleurs dans toutes les directions comme autant de têtes aux aguets. Leurs
couleurs tantôt vives – rouges et violettes – , tantôt tendres – rose-orangées et ivoire – se
répartissent harmonieusement, laissant échapper ici quelques boutons, là quelques feuilles
d’un vert pastel. La simplicité prend ici des accents de noblesse. L’aspect négligé est en réalité
harmonieusement orchestré. Chaque pétale, chaque feuille est traitée avec minutie pour
rendre la singularité de sa forme, les nuances délicates de ses tons. Bien que dégagé de toute
intention iconographique prônant la vanité des choses, ce bouquet dont la variété n’arriva en
100 Europe qu’au début du XIXe siècle, n’est pas sans évoquer la grande tradition de la nature
morte où chaque fleur est porteuse d’un symbole.
Henri Fantin-Latour (1836-1904) est un peintre français formé par son père,
portraitiste, dont il acquiert un grand talent pour ce genre. Il poursuit ensuite son éducation
à l’Ecole des Beaux-arts de Paris. Familier du Louvre, où il copie les grands maitres, il se
passionne pour la peinture vénitienne et son traitement de la lumière, notamment chez
Titien et Véronèse. Il se lie d’amitié avec Edouard Manet, Berthe Morisot puis James
Whistler qui l’emmène en Angleterre et l’introduit auprès d’une clientèle qui s’entiche de ses
natures mortes et de ses fleurs. Ami du peintre réaliste Gustave Courbet mais aussi proche du
cercle des Impressionnistes, il garde néanmoins son style propre et oriente sa peinture vers le
portrait de groupes dont les plus célèbres sont conservés au Musée d’Orsay, tels L’Hommage
à Delacroix ou L’Atelier aux Batignolles. Retiré à Buré, en Normandie, à la fin de sa vie, il
se consacre presque exclusivement à ses bouquets de fleurs qu’il cueille dans son jardin et
dont celui-ci est un exemple admirable par sa fraicheur et son naturel. Fantin-Latour semble
en effet y résumer tout son art en réalisant un véritable « portrait de fleurs » où la poésie
transcende le réalisme de la touche.