Page 66 - catalogue tableaux_08-2020
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GUSTAVE COURBET
(ORNANS, 1819 – LA TOUR-DE-PEILZ, 1877)
Le Doubs à la Maison Monsieur
1875
Huile sur toile signée au dos 50 x 61 cm.
Publication
Oeuvre reproduite dans le livre Gustave Courbet : Peintre de l’art vivant,
Robert Fernier, Paris, 1969.
Au fond d’une vallée, une grande bâtisse, presque écrasée par les hauteurs abruptes
qui l’entourent, occupe le centre de ce paysage montagneux. Elle borde un petit lac où se
reflète, plus ténue, sa façade blanche. De l’autre côté du lac, au premier plan, une barque
est accostée à une rive herbeuse et ensoleillée par laquelle notre regard entre dans le tableau.
La composition, parfaitement équilibrée, s’organise à partir de cet axe que tracent la barque,
la maison et son reflet, seuls témoins d’une présence humaine dans ce paysage presque
sauvage. Les versants des deux montagnes descendent vers la bâtisse comme les lignes de fuite
convergeraient vers un point central. Aux cimes crénelées des sapins, à droite, correspondent
les arêtes dentelées de la falaise, à gauche. A l’arrière, au centre, pointe une troisième
montagne, bleutée, qui ferme l’horizon. Cet espace sombre et clos s’ouvre vers nous. Les
couleurs y sont saturées : à la minéralité des gris du flanc de la montagne, où affleure la
roche, répondent les verts de la végétation. Sombres, virant au brun, pour les conifères, plus
vif pour l’herbe du premier plan. L’étendue d’eau offre une synthèse de cette gamme par son
66 miroir grisé aux reflets verdâtres.
Gustave Courbet (1819-1877) est le chef de file du courant réaliste. Fils d’agriculteur,
il est très proche de la nature. A Paris, il débute à 20 ans son apprentissage de la peinture
dans l’atelier de Charles de Steuben et fréquente régulièrement le Louvre où il admire la
peinture hollandaise et espagnole du XVII siècle , mais copie aussi Géricault. Il prend alors
e
un atelier et se lie d’amitié avec les artistes Bohème, notamment Baudelaire. Après un voyage
en Hollande où il découvre Rembrandt et Hals, il retourne chez lui à Ornans pour opérer
un changement radical dans sa peinture qu’il qualifie lui-même de « réaliste ». Son chef –
d’œuvre, Un Enterrement à Ornans, aujourd’hui au musée d’Orsay, fera scandale au Salon
de 1851, considéré comme trop réaliste voire socialiste. Désormais sa peinture choque, ses
nus féminins, trop sensuels, sont jugés dégradants. Il n’abandonne pas cependant le paysage,
parcourant le Languedoc, la Normandie et les Charentes où il peint et expose même avec
Corot. Membre actif de la Commune de Paris en 1871, il est condamné à financer la
reconstruction de la colonne Vendôme. Ruiné, il s’exile alors pour la Suisse où il reprend
une activité prolifique et connait une notoriété internationale. Il doit alors s’entourer de
collaborateurs pour répondre aux demandes. Le Doubs à la Maison Monsieur témoigne de
cette dernière période de sa carrière.