Page 218 - catalogue tableaux_08-2020
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MAURICE UTRILLO
PARIS, 1883 – DAX, 1955)
Église Saint-Rémy de Domrémy sous la neige
1937
Huile sur toile signée et datée en bas à droite.
34 x 47 cm
Certificats Petrides et Fabris.
De l’église actuelle de Saint-Rémy on reconnait surtout le clocher-porche, massif et
quadrangulaire avec son toit à double pente. Représentée probablement depuis le chevet,
autour duquel s’étalait le cimetière du village, l’église offre cependant quelques entorses
à la réalité. Cette succession de toits pentus aux orientations différentes qui témoignerait
d’une architecture étrangement complexe, laisse penser que le peintre représente l’édifice de
mémoire. Les ouvertures à doubles ogives du clocher sont ainsi devenues, sous sa palette,
deux fenêtres distinctes surmontées d’un œil-de-bœuf. Mais l’impression d’ensemble est
pourtant la bonne, qui nous restitue la pierre blonde de cette église de village dont les toits
enneigés et le ciel gris qui la surplombe nous transporte dans la froideur d’un hiver vosgien.
La composition, caractéristique d’Utrillo, laisse une large place à son traitement orthogonal
de l’architecture. Avec ce style naïf et frais, qui en fait la signature, il dispose ses personnages,
petits pantins aux bras écartés, selon les lois de la perspective en les faisant décroitre avec
leur éloignement. Leurs couleurs vives tranchent avec la palette ocre et blanche de l’église
et du paysage hivernal, dont les silhouettes dépouillées des arbres, à droite, accentuent la
218 profondeur de l’espace.
Maurice Utrillo (1883-1955) est un peintre français qui se consacre principalement
aux paysages urbains. Fils de la peintre et modèle Suzanne Valadon, mais de père anonyme,
il va connaitre une vie perturbée, sous l’emprise de l’alcoolisme. Reconnu tardivement par
le peintre catalan Utrillo, amant de sa mère, il en prendra le patronyme en 1891. Baignant
dans le milieu artistique bohême de l’entourage maternel, il est encouragé à la peinture
par sa mère. Sa signature témoigne de l’attachement qu’il lui porte avec le « V. » final pour
« Valadon ». Formé chez le peintre Alphonse Quizet, il s’installe à Montmartre qu’il choisit
comme sujet de prédilection de sa peinture. Il en peint rues et cafés, qu’ils fréquentent
assidument, où se glissent parfois de rares silhouettes humaines. Durant sa « période blanche »
(1909-14), il utilise le zinc qu’il mélange au plâtre pour traduire la décrépitude des murs de
Montmartre. Son style naïf rend néanmoins avec précision la topographie des lieux. Son
sens aigu de l’observation crée une atmosphère empreinte d’une certaine mélancolie. Peintre
prolifique mais fragile, s’il tire profit très tôt de sa peinture, ses crises nerveuses et éthyliques
le conduisent à plusieurs tentatives de suicide. Cependant, parrainé par les amis de sa mère,
Renoir et Degas, il gagne en notoriété grâce au marchand d’art Paul Guillaume, qui organise
sa première grande exposition en 1922.