Page 188 - catalogue tableaux_08-2020
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CAMILLE PISSARRO
                        (CHARLOTTE-AMÉLIE, 1830 – PARIS, 1903)


                        Femme étendant du linge

                        1887
                        Huile sur toile monogrammée en bas à gauche73 x 60 cm.
                        Certificat Lionel Pissarro
                        Publication
                        Œuvre répertoriée dans le Catalogue raisonné de l’œuvre de Camille Pissarro, Rodo & Venturi,
                        n.716 et dans le Critical Catalogue of Paintings, Wildenstein Institute, n° 853.
                        Provenance
                        Vente collection Pissarro 3.12.1928 lot 43.


                             On joue ici avec les plans et l’œil doit trouver ses repères pour comprendre l’espace. En
                        effet, la paysanne accroche son linge à un fil qui coïncide avec la corniche du toit de la bâtisse
                        à l’arrière-plan. Lequel toit est aussi parallèle au bord du tableau. L’espace ainsi rapporté en
                        bandes, de ciel, de toit, de mur, semblerait bien plat s’il n’était ce parapet, de biais, qui vient
                        en creuser la profondeur. Point de dégradé de lumière non plus pour suggérer des volumes,
                        mais des couleurs, vives, intenses, juxtaposées en fines hachures verticales qui structurent
                        les formes et construisent l’espace. La touche est partout visible, tantôt régulière tantôt
                        plus libre, striant la composition à l’exception du ciel au traitement vaporeux. La palette
                        est chaude, y dominent les rouges et les ocres rehaussés de vert. Seul le tablier d’un bleu
        188             turquoise dépare dans cette harmonie pour mieux attirer notre attention sur le protagoniste
                        de cette scène dont la silhouette se fond dans le décor. Les deux linges blancs qu’elle étend
                        constituent aussi deux ruptures dans cette mosaïque de couleurs. Le peintre se sert ici de la
                        couleur pour construire et unifier l’espace, grâce à une touche homogène qui traite avec la
                        même constance tous les objets du tableau, comme autant de motifs juxtaposés.

                             Camille  Pissarro  (1830-1903)  est  un  peintre  français  considéré  comme  l’un  des
                        fondateurs de l’impressionnisme. Destiné à travailler dans l’entreprise paternelle aux Antilles,
                        il s’installe en France à 25 ans et suit des cours à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris. Il rencontre
                        Courbet,  Daubigny  et Corot dont  il  se  revendique  un  temps  l’élève.  Il  fréquente  aussi
                        Cézanne et Monet qu’il ira rejoindre à Londres pendant le siège de Paris. A partir de 1866, il
                        séjourne régulièrement à Pontoise pour se consacrer à la peinture de paysage. Il côtoie alors
                        Daubigny, installé à Auvers-sur-Oise tout proche. Pontoise devient l’épicentre de la création
                        impressionniste où se retrouvent Cézanne, Gauguin, Monet… Pissarro y peint la majeure
                        partie de son œuvre et fait figure de maitre du mouvement impressionniste organisant les
                        expositions. En 1885, sa rencontre  avec Seurat l’enthousiasme et l’invite à s’essayer à la
                        technique du pointillisme dont cette Femme étendant du linge offre ici un rare témoignage
                        dans son œuvre. Le traitement hachuré des couleurs se rapproche des pointillés de Seurat
                        mais garde néanmoins une vigueur plus chaleureuse laissant percevoir le geste de l’artiste.
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